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Page:Boulenger - Romans de la table ronde II, 1923.djvu/28

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LES AMOURS DE LANCELOT DU LAC

tout pensif, et ainsi allèrent-ils jusqu’à ce qu’ils parvinssent à la cité de Nohant

Alentour le pays était ravagé et les maisons incendiées ; mais le roi de Northumberland et ses hommes étaient alors occupés à piller à quelque distance, si bien que le portier les laissa passer, quand il vit qu’ils n’étaient que trois. Les vilains des environs étaient venus se réfugier dans la ville, et elle était si pleine de gens que le blanc damoisel erra longtemps avant de trouver à se loger ; enfin, dans une petite rue, il aperçut un boucher qui lui sembla prud’homme, assis sur les marches de sa maison. L’un des écuyers vint requérir ce vilain de les héberger ; il répondit qu’il n’avait point de place. Pourtant, quand sa femme, qui était bonne à Dieu et au siècle, l’en eut prié, il consentit à recevoir les étrangers dans une grange qu’il avait. Là, les écuyers désarmèrent leur seigneur, puis ils firent nettoyer tout et joncher le sol de paille fraîche, dressèrent un riche lit, firent des sièges, allumèrent un beau feu de bûches sèches et de charbon, mirent les chevaux à l’écurie, les pansèrent, leur donnèrent l’avoine ; enfin ils tirèrent des coffres de belles robes de chevalier et de valets, blanches comme fleur en avril, dont le damoisel et eux-mêmes se vêtirent ; et, après avoir pris soin d’enfermer les chevaux à l’étable et les malles dans une chambre dont ils ôtèrent la clef, ils s’en furent