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Page:Boulenger - Romans de la table ronde III, 1922.djvu/118

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LE CHÂTEAU AVENTUREUX

Gauvain les vit tout à coup s’agenouiller : un pigeon blanc volait par la salle, portant dans son bec un encensoir d’or qui emplit le palais entier d’une odeur plus douce que beaume. Puis, à peine l’oiseau se fut-il envolé par une fenêtre, les garçons dressèrent les tables et tous les chevaliers s’assirent sans sonner mot, priant à voix basse. Cependant, la plus belle, la plus gente, la plus plaisante demoiselle du monde entrait, qui élevait à deux mains au-dessus de sa tête un très riche vase en semblance de calice ; mais nul n’eût su dire de quoi ce vase était fait, car il n’était de bois, ni d’aucune sorte de métal, ni de pierre, ni de corne, ni d’os, et un très beau linge le voilait. Et quel était ce vase, le conte ne le dit pas à cet endroit ; il en sera devisé à loisir plus avant et, le moment venu, on n’en cèlera rien, car c’est une chose très digne d’être racontée ; mais il faut laisser courre cette histoire comme elle doit aller.

La belle pucelle fit le tour des tables, portant son vase très précieux, puis elle sortit ; et quand messire Gauvain, qui l’avait suivie de l’œil, se retourna ébahi de sa grande beauté, il vit que devant chacun des chevaliers se trouvaient les meilleures choses du monde à manger, qui semblaient être sorties de la table ; mais devant lui il n’y avait rien du tout. Dont il fut fort surpris et dolent ; pourtant il résolut d’attendre, pour en demander la raison, que le repas fût