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LA DEMOISELLE REQUISE D’AMOUR

jusqu’au menton. Après quoi il ramassa les armes du vaincu et se mit en devoir de raccompagner la pucelle au manoir.

Or elle était gente, fine et très belle, si bien que, tout en cheminant, il la requit d’amour et la pria de devenir son amie.

— Mais qui êtes-vous ? demanda-t-elle.

Il répondit qu’il était compagnon de la Table ronde et qu’il avait nom Gaheriet, frère de monseigneur Gauvain.

— En nom Dieu, répondit-elle, j’ai assez ouï parler de vous ! Et je sais que vous avez une amie en ce pays : c’est la demoiselle de la Blanche Lande. Je vois bien que vous parlez comme vous faites pour m’éprouver.

— Demoiselle, je l’aimais ; je ne l’aime plus.

— Mais quelle sûreté aurai-je que vous ne m’abandonnerez pas à mon tour pour une autre, quand vous laissez ainsi votre amie qui est plus belle et gentille femme que moi ? Je ferais folie en vous donnant mon amour, car sitôt que vous m’auriez eue à votre plaisir, vous me quitteriez comme elle.

— Tout ce que vous dites ne sert de rien. Nous sommes loin de tous et seul à seule : il vous faut faire ce que je veux.

— Comment ? me voulez-vous prendre de force ?

— Nenni ; mais je vous prie de vous donner de bonne grâce.