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LE CHÂTEAU AVENTUREUX

n’eussent été ses peintures. Car tous les matins il venait saluer l’une après l’autre les images qu’il avait tracées de la reine, puis il les baisait sur la bouche plus tendrement qu’il n’avait jamais baisé nulle autre que sa dame, et il pleurait devant chacune d’elles et lamentait de tout son cœur ; après quoi il regardait ses propres chevaleries qu’il avait toutes figurées, et il se réconfortait un peu.


XXV


Pour qu’il fût plus aise, Morgane avait fait planter sous ses fenêtres un beau verger. Lorsque Pâques furent passées pour la seconde fois, les arbres se couvrirent de feuilles et se chargèrent de fleurs, et à voir la rose qui chaque jour fleurissait, fraîche et nouvelle, Lancelot sentait son cœur se réjouir, car il pensait au visage de sa dame, qu’elle avait si clair et vermeil qu’il ne savait lequel l’était davantage, de la rose ou de lui.

Un dimanche qu’il s’était levé au chant des oisillons, il s’assit au bord de sa fenêtre grillée et demeura là jusqu’à ce que le soleil fût répandu sur le jardin. Au rosier s’épanouissait une fleur cent fois plus belle que les autres, et il lui ressouvint plus que jamais de la reine qui, de