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LE CHÂTEAU AVENTUREUX

revienne en son droit sens, car c’est assurément un bon chevalier.

Et, aidé de son écuyer, il lia Lancelot tout endormi dans le lit par des chaînes et des cordes, et le fit ainsi transporter dans son château.

Il le retint là le reste de l’hiver, puis tout l’été ; mais il ne put le guérir, quoi qu’il fît. Lancelot, bien nourri, vêtu de riches robes, avait retrouvé sa grande beauté, et il semblait maintenant si paisible qu’on finit par le laisser aller à sa guise sans autre entrave qu’une petite chaîne aux pieds pour qu’il ne s’éloignât point. Ainsi demeura-t-il chez son hôte près de deux ans.

Un jour qu’il était assis sur le mur du château, il vit passer un sanglier chassé par Bliant et ses veneurs, et il lui vint grand désir d’aller avec eux. Il voulut courir, mais, se trouvant gêné par sa chaîne, il s’en irrita et la tordit si rudement qu’il la rompit ; puis il descendit l’escalier, les chevilles sanglantes, sauta sur un cheval tout sellé qu’un sergent avait laissé à l’attache dans la cour, fit force d’éperons derrière la chasse qu’il rejoignit ; et le voilà qui crie à la meute et l’excite, comme celui qui s’entendait merveilleusement à cela, tant qu’enfin le porc s’arrête et commence de faire tête aux chiens dont il occit plusieurs en peu de temps. Tous les veneurs avaient été distancés, sauf Bliant.