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LES VALETS EN JOIE

mais, lorsqu’il entendit les paroles, il devint tout honteux et morne.

— Vous dites vrai, fit-il : à trop demeurer céans, je ne conquerrai jamais ni prix, ni louange !

Et le lendemain, sitôt que l’alouette chanta et que le jour eut vie, il se fit armer ; puis il alla prendre congé du roi et de la reine, qui le recommandèrent à Dieu, et il s’éloigna par la forêt de la Sapinoie.

C’était en mai, quand la rose est fleurie et que sous les hauts arbres feuillus les oiselets font : « Oci ! oci ! » : alors les tourterelles se répondent. Bohor et son écuyer chevauchaient, chacun tenant une fleur à la main, sans se soucier de rien, tant qu’enfin, à la nuit tombée, ils s’égarèrent et qu’il leur fallut coucher sous un arbre. Et certes, s’ils manquèrent des viandes qui conviennent à des corps d’hommes, leurs chevaux purent paître à leur aise, ce soir-là. Mais le lendemain, quand le soleil abattit la rosée, ils se remirent en route, aussi enjoués que la veille. Et le valet chantait :

 
Une donzelle
Légère et belle,
Gente pucelle
Bouchette riant.
Qui me rappelle :
« Viens çà ! me dit-elle.