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Page:Boulenger - Romans de la table ronde IV, 1923.djvu/178

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L’OFFRE DE LANCELOT

celui-ci ne lui rendit pas son salut, pensant que, s’il le faisait, son neveu s’en chagrinerait. Et en effet messire Gauvain se hâta de parler pour lui :

— Lancelot, messire le roi, mon oncle, est venu vous garantir que, si vous m’outrez dans notre combat, il laissera le siège et regagnera le royaume de Logres.

— Messire Gauvain, dit Lancelot, si vous vouliez, nous renoncerions à cette bataille, quoique, après votre appel de trahison, je ne puisse la laisser sans honte. Et sachez bien que je ne parle point par couardise, car, armé et monté sur mon destrier, je saurais, s’il plaisait à Dieu, défendre mon corps contre le vôtre. Mais je souhaite si fort d’avoir la paix avec vous que, pour cela, je vous ferais volontiers hommage avec toute ma parenté, hormis seulement mon frère et mon cousin, qui sont rois ; je partirais demain de Gannes, nu-pieds, en chemise, et je resterais en exil dix ans au besoin, tout seul ; et je vous pardonnerais ma mort, si elle advenait durant ce temps, pourvu seulement qu’à mon retour j’eusse votre compagnie et celle de monseigneur le roi comme je les avais naguère. Et je vous jure par tous les saints que je n’ai pas occis de sang-froid Gaheriet, votre frère, et que sa mort m’a fait grand deuil.

Lorsqu’ils entendirent Lancelot parler ainsi, tous ceux qui étaient là sentirent l’eau du cœur leur monter aux yeux.