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ÉCLAIRCISSEMENT

morts… Sa vertu appliquée, exacte jusqu’à la dureté, lui mérite enfin de… partager les récompenses suprêmes ».

Tels sont les trois élus, si variés, montrant si bien trois types d’âmes, pour ainsi parler. Au-dessous d’eux, voici le pécheur repentant représenté par Lancelot. Il était le meilleur chevalier du monde, le plus renommé, le héros courtois idéal ; et pourtant, à peine est-il entré en quête, les pires humiliations l’accablent : c’est qu’il ne s’agit plus ici d’une quête terrestre, mais d’une quête mystique, où les aventures ne sont plus « du siècle », mais « célestielles », et où la valeur mondaine n’a plus aucun prix. Il s’en aperçoit, se confesse, se convertit, mène une vie ascétique et pieuse. Aussitôt « il reçoit du ciel des encouragements » ; mais il n’est pas arrivé à la perfection : l’auteur « lui a prêté des faiblesses, des erreurs continuelles, comme si une longue existence passée dans le péché laissait l’âme meurtrie et impuissante à s’élever très haut… Il ne comprend pas le langage mystique que parle le monde sensible… Il lui manque la confiance totale en Dieu, l’oubli de la raison terrestre, le sens du miracle… Il ne penserait pas, si Dieu même ne le lui rappelait rudement, qu’un signe de croix suffit à écarter les lions… Parce que Lancelot s’est efforcé vers le bien, il sera récompensé selon son mérite qui n’est pas parfait ; mais, parce qu’il fut pécheur, il sera puni. Il pénètre donc dans le château du Graal, mais sans