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LA SAINTE NEF

d’une part, ses armes de l’autre, il se mit à pleurer.

— Hélas ! chétif, gémissait-il, mauvais que je suis, qui me suis trouvé si vite au point de perdre cette virginité qu’on ne peut jamais recouvrer !

Cependant, il essuyait son épée et reprenait ses chausses et sa robe ; puis, quand ce fut fait, il pria Notre Seigneur de lui envoyer Son conseil et Sa miséricorde ; enfin il s’étendit sur le rivage, car sa blessure l’empêchait de marcher, et mena toute la nuit grand deuil, suppliant Dieu de lui accorder Sa pitié afin que le diable ne l’induisît plus en tentation.

Au jour levant, il découvrit sur la mer une nef qui cinglait vers lui, vent arrière, et qui semblait voler comme l’oiseau, tant elle allait vite. Quand elle fut proche, il vit qu’elle avait des voiles de soie blanche comme fleur naissante ; et sur le bordage on pouvait lire en lettres d’or :

Ô homme qui veux entrer en moi, garde-toi de te faire si tu n’es plein de foi, et sache que je ne te soutiendrai plus et que je t’abandonnerai si tu tombes jamais en mécreance.

À l’avant se tenait un vieillard vêtu comme un prêtre de l’aube et du surplis ; mais il portait sur la tête, en guise de couronne, un bandeau de soie blanche, large de deux doigts, où étaient tracés des mots par lesquels Dieu était sanctifié.

— Perceval, dit ce prud’homme, seras-tu