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Page:Boulenger - Romans de la table ronde IV, 1923.djvu/71

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LE SAINT GRAAL

le livre de Merlin l’Enchanteur a suffisamment devisé de tout cela, en sorte qu’il n’y a pas d’utilité à le répéter : cela alourdirait ce conte-ci, qui est très bon. Il faut seulement dire ce qui ne l’a pas encore été : c’est que, lorsque la nef fut prête et que toutes choses y eurent été disposées, Salomon la fit amarrer au rivage ; et la même nuit il eut un songe : il vit un Homme qui descendait du ciel en compagnie de beaucoup d’anges et qui arrosait tout le navire d’eau bénite, disant : « Cette nef signifiera ma nouvelle maison » ; ensuite l’Homme faisait écrire des lettres sur le bordage par un ange de sa compagnie ; après quoi Il s’évanouissait de telle manière, avec les siens, qu’on n’aurait su dire ce qu’il était devenu. Le lendemain, sitôt que Salomon fut éveillé, il alla voir la nef et trouva que les lettres tracées par les anges disaient ceci :

Ô homme qui veux entrer en moi, garde-toi de le faire si tu n’es plein de foi, et sache que je ne te soutiendrai plus et que je t’abandonnerai si tu tombes jamais en mécréance.

Et à peine eut-il lu cela, les voiles de la nef se gonflèrent et le vent l’emporta sur la mer, où elle disparut en peu de temps. Et ce songe est de grand sens, car il montre que la nef incorruptible de Salomon signifie Sainte Église : c’est