Page:Bouniol - Les rues de Paris, 1.djvu/58

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M. de Casaux ; si vous le préférez, nous irons passer notre exil en Amérique. N’ayez aucun souci, j’ai de la fortune ; je puis sans me gêner pourvoir à toutes les dépenses. Il est sage de fuir une terre qui menace de dévorer ses habitants. »

Bailly, malgré les instances de sa femme, refusa : « Depuis le jour, répondit-il, où je suis devenu un personnage public, ma destinée se trouve invariablement liée à celle de la France ; jamais je ne quitterai mon poste au moment du danger. En toute circonstance, la patrie pourra compter sur mon dévouement. Quoiqu’il doive arriver, je resterai. »

Le 6 juillet 1793, Bailly quittait Nantes pour aller habiter Melun où Laplace, son ami, lui avait offert l’hospitalité. Par malheur, peu de jours avant, une division de l’armée révolutionnaire était venue occuper la ville. Bailly, reconnu en arrivant par un soldat, fut sommé par celui-ci de le suivre à la mairie. Mis en état d’arrestation, puis, par un ordre du comité du salut public, conduit à Paris et écroué à la Force, il en sortit quelque temps après, sous bonne escorte, cité comme témoin dans le procès de Marie Antoinette. Mais sa conduite, dans cette circonstance, ne fut pas celle qu’espéraient, le jugeant d’après eux, les ennemis de la reine. Non-seulement il s’inclina devant elle avec l’air du profond respect, mais en entendant certaines imputations odieuses de l’acte d’accusation, il ne put retenir le cri de son indignation et qualifia, comme elles le méritaient, ces exécrables calomnies. Cet acte courageux, qui effaçait bien des fautes, ne lui fut pas pardonné par les hommes de la Terreur. Un mois après, traduit devant le tribunal