Page:Bouniol - Les rues de Paris, 2.djvu/108

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LAMARTINE[1]


« Il est des erreurs tellement évidentes, des jugements si manifestement empreints de passion, qu’ils ne trompent que ceux qui veulent être trompés. Le danger n’est point là ; craignez beaucoup plus ces sophismes déguisés avec tant d’art et parés de tant de séductions qu’il devient presque impossible de s’en défendre. Par malheur, ce danger se cache souvent dans la parole et les écrits des hommes supérieurs comme sous les fleurs parfumées le poison qui donne la mort.

« Comme ces hommes sont doués d’une sensibilité exquise, les impressions qu’ils reçoivent, vives, profondes, passionnées, décident d’une manière souveraine de la direction de leurs idées et de leurs opinions ; leur intelligence pénétrante trouve facilement des raisons à l’appui de la cause qu’ils ont adoptée ; ils fascinent le vulgaire et le mènent à leur gré.

« Peut-être ne faut-il point chercher ailleurs la cause de l’inconsistance que l’on a si souvent remarquée chez des hommes d’un esprit supérieur. Ils adorent aujourd’hui ce qu’ils brûleront demain ; l’erreur qu’ils condamnent maintenant, ils la défendaient hier comme un

  1. Alphonse de Lamartine, né à Milly, en 1790, mort à Paris le 28 février 1869.