Page:Bouniol - Les rues de Paris, 2.djvu/189

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la poussaient à quitter sa ville natale ; une catastrophe qui lui survint au milieu de ses plus grandes joies acheva de la décider. Au retour d’un grand bal d’où la jeune fille, présentée à la duchesse de Berry, revenait transportée, elle ne tarda pas à s’apercevoir qu’on avait profité de son absence et de celle de sa mère pour pénétrer dans la maison à l’aide d’une double clef et lui dérober toute sa petite fortune : non-seulement l’argent de la dépense courante, mais deux sacs contenant l’année de sa pension et les gratifications qu’Élisa venait de toucher, et, ce qui était pire, une somme de 2 000 francs destinée à l’achat d’une petite maison.

« La foudre tombée aux pieds d’Élisa ne l’aurait pas plus attérée qu’elle ne le fut quand elle s’aperçut du vol, » dit la mère. On ne s’explique pas trop après cela les scrupules qui font qu’Élisa, en dépit de ses soupçons, se refuse à toute démarche pouvant amener la découverte du coupable.

« Restons, maman, restons !… Dussé-je avoir la preuve que c’est le malheureux que je soupçonne, j’aime mieux qu’il plie sous le poids de ses remords que de plier sous le poids des fers et du déshonneur. »

Peu de jours après, les deux dames partaient pour Paris où la fortune fut prompte à les dédommager : car, l’imprimeur Crapelet, dont elles avaient fait connaissance, offrit d’imprimer une seconde édition des Poésies en faisant toutes les avances ; et bientôt après, le ministre Martignac, auquel Mlle Mercœur avait adressé des vers, lui annonçait, avec sa souscription personnelle pour 50 exemplaires, que sa pension littéraire serait portée de 300 francs à 1 200 francs. Cette pension ne faisait point