Page:Bouniol - Les rues de Paris, 2.djvu/269

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faisait partie, il s’informa de l’abbé Dicquemare qu’il connaissait par quelques-uns de ses écrits. Il lui fut répondu qu’il n’y avait personne de ce nom dans la ville, sinon certain original qui passait sa vie à satisfaire une curiosité extravagante.

« Vous ressemblez, Messieurs, dit Parmentier, à ces Abdéritains de La Fontaine, pour lesquels Démocrite était un insensé. Ignorants du trésor que vous possédez, vous prenez pour de la folie cette généreuse passion de la science qui détache de toutes les préoccupations vulgaires. »

Il se fait aussitôt indiquer la demeure de Dicquemare et s’y rend, non pas seul, mais accompagné du général et de tout son état-major, pour témoigner hautement par cet honneur de l’estime que tous faisaient du savant abbé que ses compatriotes, les honnêtes marchands et bourgeois du Havre, commencèrent dès lors à regarder avec d’autres yeux.

Dicquemare, à tous égards méritait ces sympathies. Prêtre dès l’âge de vingt et un ans, son goût pour les sciences naturelles l’avait conduit à Paris d’où, après quelques années d’études, il revint au Havre, pressé de joindre la pratique à la théorie. On lui dut la découverte de faits neufs et curieux, par exemple sur la reproduction des actenies ou anémones de mer, et sur leur propriété de faire pressentir par le degré de leur extension l’état futur de l’atmosphère ; ils sont ainsi des baromètres naturels. Ses observations sur les méduses, sur le grand poulpe et les limaces de mer, sur les tarets si funestes pour les navires et les digues dont ils percent le bois, en révélant des faits très-singuliers, ne furent pas