de taille élevée, aux cornes bien plantées, portant une charge de bois de cent à cent vingt kilos, sous laquelle il disparaît, ne laissant voir que sa belle tête et quatre jambes nerveuses et fines. La masse entière fait un brusque écart à notre approche, entraînant le conducteur dont on ne voit que les jambes sous le grand chapeau de paille qui le protège du soleil. Par respect, il enlève à notre rencontre la pipe de ses dents, et pousse des aï-gou ! aï-gou ! extraordinairement expressifs à la vue du grand cheval que je monte ; tout à l’heure il demandera au « mapou » : « Quel est ce Japonais, où va-t-il, et que fait-il ?… »
Puis ce sont des caravanes de petits chevaux qui passent en trottinant. Les cavaliers s’empressent de mettre pied à terre, car la politesse veut qu’un inférieur ne passe pas à cheval à côté d’un supérieur, et les Européens sont regardés comme tels ; les chevaux, eux, ont moins de civilité et hennissent furieusement au passage.
Ça et là des militaires en tournée regagnent les petits postes qui sont échelonnés le long de la route ; ils marchent, le fusil sur le cou, les deux bras s’appuyant sur l’arme horizontale, façon commode peut-être de la porter, mais peu militaire. Leurs pantalons aussi, généralement très aérés, n’ont guère l’allure martiale, mais semblent avoir été déchiquetés par la mitraille ou par un trop long usage.
Nous rencontrons encore des « yang-banes » à cheval, beaucoup de piétons, gens paisibles, comme leurs bœufs. Ils marchent sans voir, absorbés dans leurs pensées, s’arrachant cependant à leur rêverie continuelle pour saluer tous les fétiches de la route, les sone-hang-dang et les tchang-seun. Ils expecto-