Page:Bourdaret - En Corée.djvu/378

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l’organisation de toute une corporation de porteurs d’eau, et à chaque entrée de la ville ce sont des processions interminables de ces hommes aux charges grinçantes et sonnaillantes, car quelques-uns attachent de la ferraille à la barre qui porte les deux seaux de bois, pour se faire reconnaître par leurs clients.

Perdu sur ce coin de l’Orient jaune, à cette heure crépusculaire qui enveloppe d’ombre la vieille cité muraillée, je pense à la puérilité de ces âmes simples et naïves qui peuplent la terre de revenants ou de choses étranges, invraisemblables, pendant que mes yeux vont des porteurs toujours en route, malgré l’heure avancée, aux lanternes des jonques, qui s’inclinent et se saluent, aux étoiles resplendissantes de ce beau ciel de Corée, et que j’écoute les « hai ! hai » de la servante, occupée avec ses clients nippons, employés des postes ou des maisons japonaises de la cité.

Le lendemain avant de quitter Pieun-Yang, je fais encore un tour sur les bords du fleuve. Là sont des bateaux chargés de tchok-hai (sorte de coquillage genre clovisse) que des marchands ambulants viennent acheter ; puis, sur la berge même, recouverte d’un monceau de coquilles vides, ils extraient les mollusques, les enfilent par cinq ou dix sur des bâtonnets, et les vendent ensuite à travers les rues, frais ou séchés, peu importe. Ailleurs se dressent des montagnes de branches de pins pour le chauffage des habitations ; puis des entrepôts de riz, de graines diverses ; des amas de peaux de bœufs, du charbon de bois, de la chaux, que l’on charge et décharge du matin au soir dans les jonques qui descendent le fleuve jusqu’à Tchénampo, port maritime de Pieun-yang.