Page:Bourdel, Charles - La science et la philosophie.djvu/24

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une saisissante netteté la pensée maîtresse de la science de son temps.

Toutefois cette tentative pour commander à la nature, si elle avait cessé d’être impie, ne pouvait cependant encore être efficace, et se trouvait frappée à l’avance d’impuissance par l’insuffisance de la conception même qui l’avait inspirée. Il y avait en effet dans cette explication des phénomènes par des forces abstraites et des propriétés spécifiques un double vice radical : elle n’était en somme satisfaisante ni au point de vue théorique, et pour l’intelligence des choses, ni au point de vue pratique, et pour l’action de l’homme sur la nature. Les causes qu’elle attribuait aux phénomènes naturels étaient des causes invisibles, non seulement situées hors de la nature sensible, mais encore irreprésentables à l’esprit. Quelle forme, en effet, quelle figure donner à ces êtres abstraits? À cet égard l’explication théologique était mieux appropriée au besoin de comprendre, car elle offrait tout au moins un sens à l’imagination. Pour l’homme antique, en effet, les dieux, dont l’univers est peuplé et dont l’intervention se manifeste en chaque évènement, ont une forme concrète; ils vivent, ils agissent, ils sont réellement présents dans les choses, et leur mode d’action est des plus