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Page:Bourdon - En écoutant Tolstoï.djvu/138

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dans des milliers d’années, un peuple viendra qui, retrouvant leurs vestiges, dira : « Quels étaient donc ces gens singuliers qui s’imaginaient que d’aller rapidement d’un point à un autre est une fonction essentielle de la vie ? » Ce peuple aura raison. Je n’ai jamais compris l’utilité des voyages ; les voyages ne servent qu’à faire perdre aux hommes leur temps ; ils sont une entrave au travail. Ne trouvez-vous pas ?[1]

Je fis en souriant :

— Maître, je viens de Paris. Ce n’est pas à moi qu’il faut demander d’être de votre avis aujourd’hui.

Tolstoï sourit à son tour :

— Soit. Mais le voyage que vous avez entrepris est pour vous la condition d’études nouvelles. Il est donc une forme de travail. Mais ce qu’on appelle les voyages d’agrément[2] ?

  1. J’ai souvent dit que le malheur des hommes vient de ne savoir pas se tenir en repos dans une chambre. (Pascal, Pensées, 1re partie, art. vii.)
  2. « La curiosité n’est que vanité. Le plus souvent, on ne veut savoir que pour en parler. On ne voyagerait