Page:Bourdon - En écoutant Tolstoï.djvu/193

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cœur, les mots de justice, de fraternité, de pardon. De proche en proche, le temps viendra de son épanouissement définitif.

— Le progrès est bien lent, et la forêt de vices à défricher infiniment profonde. Alors, tant de centaines de siècles auront passé, que l’univers peut-être aura achevé un cycle, et que la vertu enfin triomphante, à l’heure de régénérer l’humanité, la verra s’abîmer dans l’évolution des mondes ?…

— Ah ! peut-être !… Mais ne regardons pas à cela. Que notre idéal soit chimérique, cela n’est pas douteux, mais peu importe ! Est-il noble, est-il pur ? Peut-il en sortir du bien et du vrai ? Est-il selon la loi morale ? Voilà ce qu’il faut se demander, et, si l’on se répond oui, il faut le prêcher sans lassitude, sans impatience… »

Ainsi parlait le glorieux maître. Sur l’incendie des batailles mandchoues, dans le tumulte des hommes furieux, dans l’entrechoquement des barbaries renaissantes, la sérénité de son âme obstinée au bien laissait tomber ces intrépides paroles de foi pacifique, que la flamme des combats volatilise,