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Page:Bourdon - En écoutant Tolstoï.djvu/198

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vous l’ouvrez, et vous jetez les yeux sur la page offerte par le hasard. Vous lisez la phrase qui se présente à vous, puis une seconde. Ces phrases, distraites de l’ensemble, n’ont pour vous aucun sens. Elles sont totalement dépourvues de signification, elles ne témoignent ni pour ni contre l’auteur. Et cependant il s’en exhale aussitôt une impression qui est de la sympathie ou de l’antipathie. C’est comme si ce livre avait une âme, et que son âme fût soudain apparente pour vous. Alors ou bien, sans pousser plus outre, vous fermez le livre, et vous le fermez pour jamais ; ou bien vous éprouvez l’inconsciente curiosité de vous approcher de l’auteur davantage, et vous poursuivez votre lecture. Mais ce n’est pas en avant que vous la poursuivez, c’est en arrière. Ce qui vous intéresse d’abord, ce n’est pas ce qui suit les deux phrases que le hasard vous a livrées, c’est ce qui les précède. Vous vous attachez moins aux conséquences qu’aux origines. Et ainsi, de page en page, si l’intérêt se continue, vous remontez jusqu’au début ; puis, arrivé à la première ligne, vous reprenez ensuite votre lecture,