Page:Bourgeois - Manuel historique de politique étrangère, tome 3.djvu/411

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pour terminer au plus vite, par la paix ou la guerre, la crise orientale et prévenir, du même coup, les ambitions des races et des souverains éveillées par cette crise même, telle était l’œuvre véritablement conforme aux intérêts de la France dont, à cette heure décisive pour la France et pour l’Europe, le chef de la diplomatie française avait pris la responsabilité.

« Toute autre politique serait fatale », dit-il à Napoléon III, en la lui présentant, le 1er mai 18S5. L’empereur, ce jour-là, eut véritablement à décider des destinées françaises et des siennes, à choisir entre la situation que, depuis Talleyrand, la France s’était faite par sa réserve et sa prudence, et les satisfactions de vanité qu’elle avait réclamées parfois avec passion, et que l’Empire semblait lui promettre. Se séparer de l’Autriche, au moment où elle nous offrait une alliance perpétuelle, c’était déjà prendre parti pour la Prusse dont le crédit en Allemagne devait grandir par l’impuissance de son adversaire, et pour la Sardaigne dont toutes les espérances demeuraient réservées ; c’était laisser à l’une l’honneur de la paix, à l’autre le profit de la guerre, et livrer aux appétits de races développés par leurs ambitions de nouveau l’avenir de l’Europe. Le choix était si grave que Napoléon III, pendant quinze jours qui ont décidé de la fin du siècle, a hésité. Le 23 avril, il refusa la concession acceptée par son ministre. Le 27 avril, il suspendait sa décision jusqu’au retour de celui-ci à Paris. Le 1er mai, persuadé par ses raisons et celles de M. Thouvenel, il autorisait son envoyé à Londres, Walewski, à proposer et à soutenir le projet de pacification réglé par les diplomates de Vienne. Le 5 mai, enfin, sans consulter Drouin de Lhuys, qui donnait sa démission, aussitôt acceptée, l’Empereur annonçait à l’ambassadeur d’Angleterre, lord Cowley, le rejet des propositions autrichiennes, conformes au désir de sa cour.

C’était, en effet, l’Angleterre qui, par sa résistance, avait fixé les irrésolutions de son allié. Depuis le jour où Drouin de Lhuys avait cru utiles pour son pays certaines conces-