Aller au contenu

Page:Bourges - Le Crépuscule des dieux, 1901.djvu/65

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
47
le crépuscule des dieux

et il revit tous les détails de l’audience de Wendessen, sa mauvaise grâce, sa hauteur, sa brutalité affectée. Il se souvint confusément que Giulia avait fait le voyage en compagnie de Franz et d’Augusta Linden. Pourquoi abandonner sa suite ? N’aurait-elle pas dû, tout au moins, venir prendre congé de lui ? Mais une femme de théâtre aussi notoire qu’elle l’était, ne pouvait disparaître ainsi ; et son caprice se réveillant, Charles d’Este finit par charger l’Italien de découvrir où se cachait la Belcredi. Hélas ! Arcangeli ne le savait que trop bien, et il eut un sourire ironique, lui qui, depuis un mois, la voyait chaque jour, passer et repasser aux Champs-Élysées. La devinant sa rivale possible, — car que faisait-elle à Paris ? — redoutant quelque intrigue secrète pour avoir accès auprès du Duc, le favori ne respirait plus de la frayeur extrême qu’il avait. Il ne servait de rien de monter la garde. Le plus sot hasard à chaque moment, pouvait tout révéler à Son Altesse ; comme de fait, un beau matin, la plupart des journaux annoncèrent que la Giulia Belcredi, célèbre diva de Buda-Pesth, allait débuter au théâtre Lyrique, dans la Flûte enchantée, de Mozart.

Le Duc lut l’annonce, bondit, et envoya aussitôt au théâtre, pour avoir l’adresse de Giulia. L’Italien, qui eût pu la dire, aurait autant aimé se jeter dans un puits, et ce fut Hildemar qui revint annoncer que la cantatrice était logée au Grand-