Page:Bourget - Cruelle Énigme, Plon-Nourrit.djvu/179

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venue naturellement à l’esprit, à lui l’enfant jusque-là si naïf, si doux, si délicat, traduisait bien la sensation qui le dominait à cette heure, et qui dura plusieurs jours. C’était un immense dégoût, une nausée intime ; mais si entière, si profonde, qu’elle ne laissait la place à rien d’autre dans son cœur. Il n’aurait même pas su dire s’il souffrait, tant le mépris absorbait les forces vives de son être. Il apercevait cette femme, qu’il avait si religieusement idolâtrée et avec une ferveur si noble, comme plongée, comme vautrée dans un tel abîme de déchéance qu’il se faisait à lui-même l’impression de s’être, en l’aimant, roulé dans la boue. C’était la vision physique dont il était la victime maintenant, d’un bout à l’autre du jour, à ce point qu’il ne pouvait l’interpréter, ni former quelque hypothèse sur le caractère de Thérèse. Cette vision s’infligeait à lui avec une précision matérielle qui touchait à l’hallucination. Oui, il voyait l’acte, et l’acte seul, sans avoir la force de secouer cette hideuse, cette obsédante hantise. Cela le paralysait d’horreur, et il ne pouvait penser qu’à cela. Une sorte de mirage ininterrompu lui montrait la prostitution de sa maîtresse, l’exécrable souillure, et, comme un homme atteint de la jaunisse regarde tous les objets à travers la bile qui lui injecte les yeux,