Page:Bourget - Cruelle Énigme, Plon-Nourrit.djvu/214

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de venir dans cet appartement, quelquefois, toute seule, je n’ai cru rien faire qui vous déplût… C’était un pèlerinage vers ce qui a été l’unique bonheur de ma vie, mais je ne le recommencerai plus, je vous le promets… »

— « C’est à moi de me retirer, madame, » répondit Hubert, que le son de cette voix troublait d’une émotion impossible à définir. «  Elle est venue plusieurs fois, » songea-t-il, et cette idée l’irritait, comme il arrive quand on ne veut pas s’abandonner à une sensation tendre. « J’avoue, » continua-t-il tout haut, « que je ne m’attendais pas à vous revoir ici après ce qui s’est passé. Il me semblait que vous deviez fuir certains souvenirs plutôt que de les rechercher… »

— « Ne me parlez pas avec dureté, » reprit-elle avec plus de douceur encore. « Mais pourquoi me parleriez-vous autrement ? » ajouta-t-elle d’un ton mélancolique. « Je ne peux pas me justifier à vos yeux. Réfléchissez pourtant que, si je n’avais pas tenu, comme j’y tenais, à la beauté du sentiment qui nous a unis, je n’aurais pas été sincère avec vous comme je l’ai été. Hélas ! c’est que je vous aimais comme je vous aime, comme je vous aimerai toujours. »

—- « N’employez pas le mot d’amour, » répliqua Hubert, « vous n’en avez plus le droit »