Page:Bourget - Drames de famille, Plon, 1900.djvu/106

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Quant à cette dernière province, puisque c’est d’elle qu’il s’agit à propos d’un de ses plus humbles enfants, la prédominance de l’élément celtique imprime une évidente unité à son histoire. Qu’en est-il sorti, pendant la longue durée du moyen âge et de l’ancien régime, alors que l’indépendance locale permettait un plus libre épanouissement des originalités ? Presque pas ou peu de grands hommes de guerre, presque pas ou peu de grands artistes, comme si la race répugnait à ce que de tels héros comportent d’excessif. Par contre, les génies prudents, les hommes de loi et les hommes d’Église y ont pullulé. Quand on est de son pays, au degré où Hector Le Prieux est du sien, les qualités et les défauts de ce pays reparaissent toujours, même si l’on fréquente un milieu et si l’on exerce un métier les plus opposés, croirait-on, à cette influence du sol ancestral. Relisez l’un de ses feuilletons dramatiques maintenant, ou l’une de ses causeries parisiennes : vous y retrouverez de la prudence d’esprit et du terre à terre, de la judiciaire et de la timidité, de l’exactitude sans éclat et une sagesse un peu pauvre. C’est un talent qui, de trop bonne heure, a cessé d’oser, et c’est un caractère qui, de trop bonne heure, s’est soumis. Si une passivité d’âme, tout héréditaire chez Hector, explique qu’en effet la direction de son ménage ait dû aussitôt appartenir à sa femme, une énigme s’impose, que l’on doit résoudre, avant de montrer cette mainmise de Mme Le Prieux sur les faits et gestes de son mari : pourquoi celui-ci, avec