Page:Bourget - Drames de famille, Plon, 1900.djvu/157

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votre protection auprès d’elle, quand j’aurai quelque difficulté. » — « Je vous l’accorderai, cousine, » avait repris le jeune homme, en souriant et rougissant à la fois. « Et ce serait peut-être le moment d’écrire à ma mère, à moi, pour lui demander ce que j’ai tant envie de lui demander, et puis je n’ose pas ? » — « Quoi donc ? » avait interrogé Reine, avec un sourire, elle aussi, sur ses lèvres entr’ouvertes et un tressaillement intérieur. Elle avait retiré son bras, et elle s’était arrêtée une seconde, comme pour s’éventer. Quoique ce ne fût guère l’endroit, ce coin de bal, avec son buffet dressé, auprès duquel ils arrivaient, pour prononcer certaines paroles solennelles, la jeune fille les attendait, ces paroles. En tête à tête, sa modestie ne lui eût pas permis de les écouter, et Charles n’eût pas eu le courage de les proférer, au lieu qu’ici, les nerfs remués par le rythme adouci de la musique, si protégés tout ensemble et si isolés parmi ces couples de robes claires et d’habits noirs qui glissaient, revenaient, tournaient, à quelques pas d’eux, il n’avait pas craint de lui dire : — « C’est que je ne le ferai que si vous me le permettez, ma cousine ?… Je voudrais donc demander à ma mère qu’elle-même écrivît à la vôtre, pour savoir si elle peut venir à Paris faire elle-même une certaine démarche… Enfin, ma cousine, si je vous priais de changer ce nom contre un autre et d’accepter de devenir Mme Charles Huguenin, que répondriez-vous ?… »