Page:Bourget - Drames de famille, Plon, 1900.djvu/254

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Le second, et non moins évident, c’était qu’un obstacle avait surgi. Charles en pouvait fixer l’apparition à quarante-huit heures près. Cet obstacle n’existait pas, lors de la soirée où sa cousine et lui s’étaient tacitement fiancés. L’accès de demi-folie qui lui avait, deux heures auparavant, sous les arbres des Tuileries, arraché son injuste insulte à la sincérité de Reine, s’était dissipé. Il croyait qu’elle avait été sincère en s’engageant, et sincère en lui demandant, avec cette supplication passionnée, qu’il ne cherchât pas à deviner la nature de l’empêchement mystérieux devant lequel elle tremblait, épouvantée. — C’était là un troisième fait positif. — Et un quatrième, qu’il s’agissait d’un mariage avec un autre. Que ce projet de mariage datât de ces tout derniers jours, Charles, encore une fois, n’en doutait pas. Sans cela Reine, au bal, n’eût pas été avec lui ce qu’elle avait été. — Que, d’autre part, ses parents à elle fussent mêlés étroitement au projet soudain de ce mariage, Charles le concluait de ce cinquième fait : Mme Le Prieux n’avait pas parlé à sa fille de la lettre de Mme Huguenin. Sur le moment, et emporté par la colère de la jalousie, il n’avait pas accordé à ce singulier détail sa capitale importance. Il comprenait maintenant que ce silence de la mère de Reine signifiait une volonté, très réfléchie, de ne pas mettre la jeune fille à même de choisir entre l’union avec son cousin et l’autre union, — avec qui ? Présentée avec quels arguments à l’appui ? Là, l’imagination de Charles s’arrêtait. Il se rendait compte que Mme Le