Page:Bourget - Drames de famille, Plon, 1900.djvu/364

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es et ses rochers dentelés, celle de Port-Cros et sa Vigie, celle du Levant et ses landes nues barraient là-bas l’horizon. A la gauche de la jeune femme, s’étendait la sombre chaîne des Maures, au bas de laquelle Hyères elle-même étageait ses maisons blanches. Et le radieux soleil enveloppait d’une gloire cette forêt, ces flots, ces îles, ces collines, ces façades lointaines, — un divin soleil de la fin de mars, qui, plus près, caressait la villa peinte en rose et les allées du jardin attenant au parc, avec leurs mimosas fleuris, leurs bordures d’iris violets, d’œillets blancs et rouges, leurs massifs de roses pâles et de larges anémones. Dans le petit bois de pins, des bruyères, hautes comme des arbres, remuaient au veut de mer leurs grappes d’un blanc très doux, les lauriers-thyms leurs bouquets d’un blanc très clair. Cette brise roulait, avec cet arôme marin, la senteur mêlée de ces résines et de ces corolles, celle aussi des plantes sauvages, des romarins et des cystes. De ci de là, les formes des végétaux exotiques s’apercevaient confusément : les larges palmes des dattiers, les poignards tordus des agaves, les barbes aiguës des yuccas. Et cette adorable vision d’un printemps presque oriental s’achevait, s’enchantait, s’ennoblissait d’un charme plus pur encore par le tintement pieux d’une cloche de chapelle. Cette voix de la petite église qui domine toute cette contrée et s’appelle du beau nom de Notre-Dame de Consolation, s’épandait dans cet air lumineux, balsamique et tiède, par frêles vibrations argentines.