Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/111

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et des fumeux paquebots. En face se profilaient les palais du quai, les deux ports au delà, leur forêt de mâts et le sauvage éperon rouge du mont Pellegrino. Les toits de la ville, à gauche, les dômes des églises et les tours des clochers s’étendaient jusqu’à l’horizon fermé par le cercle de montagnes qui a fait donner à la grande plaine d’orangers et de citronniers où la ville repose le surnom de « Conque d’or ». À cette heure du crépuscule où les volets des trois fenêtres étaient fermés, quelle intime physionomie d’un délicieux home prenait ce retrait, encore isolé du premier couloir d’entrée par un paravent ! Trois lampes l’éclairaient : la plus grande qui rayonnait au milieu, et deux petites posées, l’une sur la cheminée, l’autre sur une table mobile auprès du feu paresseusement assoupi. Des étoffes anciennes, drapées de-ci de-là sur les meubles, le rangement même de ces meubles, ici des portraits dans leurs cadres, ailleurs des livres dans un casier mobile, plus loin quelque menu bibelot, partout des fleurs : des roses, des œillets, des mimosas dorés, un palmier dans un coin, dans un autre de grands bouquets lustrés de branches d’eucalyptus, — comme la jeune fille et sa mère avaient su l’art, avec des riens, de rendre personnel ce gîte de passage, très heureusement choisi dans ce vaste caravansérail cosmopolite ! On oubliait que l’on était à l’hôtel, dans une des cases d’un bâtiment