Aller au contenu

Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/15

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Toutes ces œuvres offrent ce trait commun de s’appliquer surtout à la notation des petits faits de conscience, dont l’ensemble se manifeste au dehors sous l’aspect de passions complètes, de volontés déterminées, d’actions définies. Les intelligences très inégales et très diverses de ces écrivains apparaissent comme douées également d’une faculté de réflexion qui leur permet d’apercevoir, dans un détail extrêmement ténu, tout l’obscur travail caché des plus minuscules ressorts intimes. C’est la mise à nu de ces ressorts qui les intéresse plus peut-être que le résultat du mouvement de ces ressorts. La sonnerie de la pendule les préoccupe moins que l’agencement des pièces dont le jeu délicat aboutit à cette sonnerie. C’est à la décomposition des phénomènes de la vie morale ou sentimentale qu’ils s’ingénient — sans même le vouloir, comme le grand évêque Africain dont l’unique ambition était de s’humilier dans un coupable passé et non pas d’étonner des lecteurs profanes par la subtilité de sa vision intérieure.

Il était naturel que cet esprit d’analyse, inné à certains tempéraments comme la disposition dramatique l’est à d’autres, trouvât de quoi s’exercer dans le roman plus encore que dans la tragédie, la comédie ou le poème lyrique. Quelques-uns des chefs-d’œuvre de ce genre sont en effet de purs travaux d’analyse :