Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/316

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comprendre… C’est trop affreux de douter quand on aime !… »

— « À mon tour je ne vous comprends pas, » interrompit le jeune homme. L’évidence venait de s’imposer à lui que des soupçons avaient traversé l’esprit d’Henriette. Il en frémit tout d’un coup jusque dans la racine de son être. Il n’eut pas le temps, d’ailleurs, d’hésiter sur la nature de ces soupçons, car la loyale jeune fille, et qui n’avait jamais menti, n’essaya pas une seconde de ruser avec son fiancé.

— « Naturellement vous ne pouvez pas me comprendre, » répondit-elle à l’interjection de Francis avec un nouveau sourire, « j’ai été folle… Je le sens maintenant que je vous ai retrouvé. Car je vous ai retrouvé… Vous m’avez fait chaud à tout le cœur en me parlant comme vous m’avez parlé. Vous avez déchiré ce voile que je sentais flotter entre nous depuis quelques jours. C’est si étrange à dire : il me semblait que vous n’étiez plus vous. Enfin, je savais que vous ne me disiez pas toute la vérité, mais vous me la direz maintenant, n’est-ce pas ? Vous m’expliquerez ce que vous m’avez caché et pourquoi vous me l’avez caché ? Et c’en sera fini de ce cauchemar… Il m’a tant tourmenté ces derniers jours, que si vous aviez dû vous en aller sans que nous eussions eu cette conversation, je ne sais ce que je serais devenue. Je souffrais trop !… »