Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/383

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cette litanie où il est demandé au Sauveur de nous soulager au nom de ses travaux et de ses langueurs, au nom de son agonie et de sa passion, au nom de sa croix et de son abandon, et elle-même, la mère, elle sentait s’insinuer dans les replis de son être tourmenté la grande paix reposante qu’elle souhaitait à sa fille, d’autant plus qu’au moment où elle se relevait de cette prière, celle-ci lui dit :

— « Que vous m’avez fait de bien, maman ! Vous m’avez sauvée de moi-même… Je sens que vous avez eu raison de me remettre en face de celui qui ne trompe pas… »

— « Et moi, » s’écria la mère en l’embrassant, « j’ai retrouvé ma fille… »

La joie profonde que la comtesse traduisait par ce cri et par ce baiser ne devait pas durer longtemps. Dès l’après-midi de ce premier jour de l’an, commencé sur cette espérance d’un décisif apaisement, elle put distinguer dans l’arrière-fond du regard de la malade quelque chose d’impénétrable qui lui fit demander, avec un renouveau d’inquiétude :

— « Tu ne te sens pas plus mal ? »

— « Non, maman, » répondit Henriette, et elle ajouta : « Au contraire, je n’ai jamais été aussi bien depuis des jours… »

Ces mots énigmatiques, bien loin de rassurer la comtesse, éveillèrent sa défiance au point