Page:Bourget - Laurence Albani, Plon-Nourrit.djvu/57

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toute saisie devant sa propre image. La glace de la grande armoire lui montrait une Laurence qu’elle n’aurait pas osé souhaiter d’être, si ressemblante et cependant si différente. Elle restait comme dépaysée dans le luxe de cette toilette, savamment composée par l’Anglaise pour faire valoir sa grâce un peu sauvage. Cet étonnement devant cette apparition lui avait soudain donné la terreur de l’être nouveau qu’elle allait devenir. Une autre fille de sa condition aurait éprouvé une joie vaniteuse, à sentir ses pieds minces pris dans des bas de soie, des étoffes légères autour de sa taille souple, et sur la noire épaisseur de ses cheveux ondulés un chapeau dont les lignes la rendaient encore plus jolie. Mais non. Une inexprimable détresse l’avait, au contraire, envahie. Lady Agnès, qui venait la chercher pour sortir, l’avait trouvée assise sur un fauteuil et le visage inondé de larmes.

– « Qu’as-tu, ma pauvre enfant ? » avait-elle demandé