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LE DISCIPLE

tudes, à l’interroger sur des détails intimes. Il avait appris ainsi que le jeune homme était le fils unique d’un ingénieur mort sans fortune, et que la mère l’avait élevé à force de sacrifices. « Mais je n’en accepterai plus, » disait Robert ; « mon intention est de passer ma licence dès cette année, puis je demande une chaire de philosophie aussitôt, dans un collège, et je travaille à un grand ouvrage sur les variations de la personnalité, dont l’essai que je vous ai soumis forme l’embryon… » Les yeux du jeune psychologue s’étaient faits plus brillants pour formuler ce programme de vie. Ces deux visites dataient du mois d’août 1885. On était en février 1887, et, depuis lors, M. Sixte avait reçu cinq ou six lettres de son jeune disciple. Une d’elles lui annonçait l’entrée de Robert Greslou comme précepteur dans une famille noble, qui passait les mois d’été dans un château situé près d’un des plus jolis lacs des montagnes d’Auvergne : celui d’Aydat. Un simple détail donnera la mesure de la préoccupation où M. Sixte fut jeté par la coïncidence entre la lettre émanée du cabinet du juge et la carte de Mme Greslou. Quoiqu’il eût sur sa table les épreuves à revoir d’un long article pour la Revue philosophique, il se mit à rechercher cette correspondance avec le jeune homme le soir même. Il la trouva tout de suite dans le cartonnier où il rangeait méticuleusement ses moindres papiers.