Page:Bourget - Les Deux Sœurs, Plon-Nourrit.djvu/110

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demande-t-elle tout d’un coup. – « Mais oui… » répondis-je en faisant semblant de ne l’avoir vu que sur cette indication. – « Vous le connaissez beaucoup, je crois ? » continua-t-elle. – « Il a été présenté à ma sœur aux eaux, » dis-je, « et je l’ai rencontré chez elle. » – « Ah ! » répliqua-t-elle simplement. Puis après un silence : – » Vous savez que je vous aime, ma chère Agathe, permettez-moi de vous donner un conseil. Tenez ce monsieur un peu à distance. Il appartient à ce que j ‘appelle les amoureux de l’espèce voyante. » – « Que voulez-vous dire par là ? » insistai-je à mon tour. – « Rien que ce que je dis, répliqua-t-elle. « Tenez-le à distance… » Des phrases de ce ton, dans cette bouche, tu sais aussi bien que moi ce qu’elles signifient : le nom de Brissonnet a été prononcé à propos de moi, ou va l’être. On jase, ou l’on va jaser… »

– « Mme Éthorel est une méchante femme, voilà tout, » répondit Madeleine, « et tu ne peux rendre le commandant responsable des vilains propos d’une vieille coquette, aigrie contre les sentiments qu’elle n’inspire plus. »

– « Je ne le rends responsable de rien, comprends-moi, » dit Agathe. « Nous avons toujours su, en le recevant, toi et moi, qu’il n’était pas du monde. Il n’en a pas les égoïsmes. Il n’en a pas non plus les prudences. Ce n’est pas en Afrique qu’il a pu