Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/123

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


— « Est-ce que les acteurs ont bien joué hier ? … »

Pourquoi fut-elle froissée de voir avec quel plaisir René s’emparait de cette question, afin d’empêcher que la causerie ne continuât dans un autre chemin que celui des banalités ? C’est que le cœur de la femme qui aime vraiment— et elle aimait— trouve des susceptibilités nouvelles au service des moindres impressions, et, toute navrée, elle écoutait René répondre : « Ils ont joué divinement. » Puis il s’engagea dans une dissertation sur la différence qu’il y a entre le jeu éloigné de la scène et le jeu tout rapproché d’un salon.

— « Pauvre petite ! » se disait madame Offarel en rentrant, « elle est si naïve, elle n’a pas su le faire parler d’autre chose que de cette maudite pièce ! » Et à voix haute, afin de se venger sur quelqu’un de ce qu’elle n’entrevoyait pas l’instant où René se déclarerait : — « Dites donc, » fit-elle, « est-ce que votre ami M. Larcher n’est pas un peu jaloux de votre succès ? … »