Page:Bourget - Un homme d’affaires - Dualité - Un Réveillon - L’outragé, Plon, 1900.djvu/239

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amer où Jules Lemaître a peut-être écrit son chef-d’œuvre tout court, j’aperçus dans une des baignoires d’avant-scène, celle de droite, qui ? Mme de Saint-Cygne elle-même. Ses cheveux châtains à reflets blonds étaient délicieusement coiffés du plus joli turban de tulle vert pâle qu’ait chiffonné la mode de cette année, et son buste, resté tout jeune, était pris dans un véritable ruissellement de paillettes assorties à la nuance du chapeau qui chatoyaient sur un fond d’étoffe d’argent. Ses manches transparentes laissaient voir le galbe délicat de ses bras frais. Elle avait auprès d’elle, dans sa loge, par une coquetterie d’une jolie impertinence, une fille de vingt-deux ans peut-être, une débutante, dont l’éclat ne la vieillissait pas trop. Son spirituel et fin visage suivait avec un éveil étonnant d’intelligence la prose cruelle et tendre que les deux actrices alors en scène, Mmes Baretta et Bartet, disaient si bien, elle qui a tout juste appris l’orthographe ! Que nous étions loin du major général, de la signora Balbi, du Tanghen et de Rapallo ! Cette fois, la curiosité fut plus forte que la discrétion, et je m’arrangeai, à l’entr’acte, pour passer devant