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de l’Institut, déjà cerclées d’or. Cette fraîcheur de son visage, cette candeur de ses prunelles, une certaine rusticité comme répandue sur toute sa personne, dénonçaient une jeunesse tout entière passée loin de Paris. II avait fait toutes ses études, sous la direction d’un prêtre, dans la toute petite ville de Lorraine où son père était juge de paix. Comment ce modeste desservant d’une pauvre paroisse de province s’était-il trouvé un éducateur assez distingué pour que son élève eût passé sa licence à Paris, sans autre préparation que celle-là ? Je n’ai jamais eu le mot de cette énigme. Quand Charles parlait du curé de Raon-en-Montagne, c’était avec une simplicité qui me donnait seulement l’idée d’un bonhomme de soixante ans, occupé de ses fleurs et de ses abeilles, un peu maniaque et volontiers caustique. Ce solitaire avait pourtant appris à son pupille, outre le latin et le grec, la langue allemande, que mon ami parlait couramment ; les mathématiques, en particulier l’astronomie ; l’histoire de la philosophie, où Charles était de première force, et la musique. Il avait sur le violon ce que les gens du peuple appellent un joli talent d’amateur.