Page:Bourget - Une idylle tragique, Plon-Nourrit.djvu/196

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est en train de spéculer à fond sur les Métaux, avec l’idée de tripler son capital ? »

— « C’est bien probable. Je ne l’ai pas écouté. »

— « Je l’ai écouté, moi, » fit l’Américain, « pas plus tard que tout à l’heure, en bas, et vous m’en voyez encore bouleversé. Je ne m’affecte pas de grand’chose, cependant… À l’heure qu’il est, » continua-t-il en regardant la jolie Mme de Chésy, qui causait avec Hautefeuille, « cette charmante vicomtesse Yvonne est sans doute ruinée, ce qui s’appelle ruinée, absolument, radicalement… »

— « C’est impossible ! … Chésy est conseillé par Brion, dont j’ai toujours entendu parler comme du premier financier de ce temps. »

— « Peuh ! » fit Dickie Marsh, « petite musique ! … On n’en ferait qu’une bouchée dans Wall Street… Mais pour les affaires de ce côté-ci de l’eau, il s’y entend assez bien… C’est justement, » ajouta-t-il avec une profonde ironie, « parce que le sieur Brion s’y entend assez bien et parce qu’il conseille Chésy, que ce garçon va y rester, poil et plume… Je ne vous ennuierai pas en vous expliquant le pourquoi. Mais je suis sûr, vous entendez, sûr comme voici la mer, qu’il se produit en ce moment un krach du fameux syndicat des mines d’argent. Vous savez au moins son existence… Tous les bulls y passeront… C’est vrai, vous ne comprenez pas : c’est notre nom pour les haussiers, qui foncent en avant, comme le taureau… Le coup part de New-York et de Londres. Chésy n’a pas trois cent mille dollars de fortune. Il m’a