pitié de moi, mais que je ne lui demandais que de la paille et du feu : « Vous aurez tout cela », me répondit-elle. En même temps, elle me fit entrer dans une petite chambre chaude et propre, où se trouvait un lit couvert d’un édredon. Mais je lui demandai en grâce de me faire donner de la paille avec des draps et de l’eau chaude pour me laver.
On m’apporta tout ce que j’avais demandé, plus un grand baquet en bois pour me laver les pieds. J’en avais bien besoin, mais ce n’était pas tout : la tête, la figure, la barbe n’avaient pas été faites depuis le 16 décembre. Je priai le domestique, qui se nommait Christian, d’aller me chercher un barbier. Il me rasa, ou plutôt m’écorcha la figure ; il prétendit que j’avais la peau durcie par suite du froid ; tant qu’à moi, je pensai que ses rasoirs étaient comme des scies.
L’opération finie, je me fis couper les cheveux et même la queue. Après l’avoir généreusement payé, je lui demandai s’il ne connaissait pas un marchand de vieux habits, car j’avais besoin d’un pantalon. Après son départ, un juif arriva avec des pantalons qu’il cachait dans un sac. Il s’en trouvait de toutes les couleurs, des gris, des bleus, mais tous trop petits ou trop grands, ou malpropres. L’enfant d’Israël, voyant que rien ne me convenait, me dit qu’il allait revenir avec quelque chose qui me plairait. En effet, il ne tarda pas à reparaître avec un pantalon à la Cosaque, de couleur amarante et en drap fin. Il était fort large. C’était le pantalon d’un cavalier, probablement d’un aide de camp du roi Murat. N’importe, je l’essayai et, prévoyant que j’aurais bien chaud avec, je le gardai. On y voyait encore, de chaque côté, la marque d’un large galon que le juif avait eu la précaution d’enlever. Je lui donnai en échange la petite giberne du docteur, garnie en argent, que j’avais prise sur le Cosaque, le 23 novembre. En outre, il exigea cinq francs que je lui donnai.
Il me restait encore trois belles chemises du commissaire des guerres : je me disposai à changer de linge, mais, lorsque je me regardai, je me dis que, pour bien faire, il me faudrait un bain, car j’avais encore, par tout le corps, des traces de vermine. Je m’informai à la domestique s’il y avait des bains près de l’endroit où nous étions ; mais ne pouvant me comprendre, elle alla chercher sa dame qui