Page:Bournon - Anna Rose-Tree.djvu/228

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duré éternellement. Émilie ! Émilie ! que de maux votre fuite va me cauſer !

Lady Harris me mande que l’affaire de Spittle eſt appaiſée, & que je puis retourner en Angleterre. Je n’en aurai jamais la force : non, le pays qui a été témoin de ſa perfidie ne reverra pas ton triſte Ami ; je gémirai loin des lieux… où j’aurois pu être le plus fortuné des Hommes.

Je mène ici une vie fort ennuyeuſe, incapable de me livrer à d’autres idées que celles de mon amour ; j’ai fui toutes les ſociétés. Enfermé dans un cabinet, je ne parle qu’à mes Gens & au Maître de Langue que j’ai pris. Je me ſuis tellement appliqué, que je ſais paſſablement l’Italien.

Ma ſanté eſt aſſez mauvaiſe, je n’en accuſe que le chagrin. Mais que me fait la vie ! puiſque je ne puis la conſacrer à la ſeule perſonne qui me la faiſoit chérir. Si tu apprenois un jour de ſes nouvelles, écris-moi ſur le champ… Que dis-je ! ne m’en parle jamais : je vais chercher à l’oublier… L’oublier ! cela n’eſt pas poſſible, à moins d’un changement total dans tout mon être. Jamais un cœur qu’elle a poſſédé ne pourra appartenir à un autre : je renonce pour tou-