Page:Bournon - Anna Rose-Tree.djvu/23

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tone que nous menons ici. Le plus petit événement devient une affaire d’importance pour de pauvres recluſes. On me fait appeler, je ne devine pas qui ce peut être. Vous le ſaurez à mon retour. Au revoir… Il faut crier miracle ! Une Lettre de ma Mère ! Et qui m’annonce ſa viſite pour vendredi ! Par quel heureux haſard s’aviſe-t-elle de ſonger à moi ? Depuis cinq ans elle ſembloit m’avoir oubliée. Vous avez été témoin, ma chère Anna, de la peine que me cauſoit ſon indifférence, & vous avez été de même témoin que je m’en étois conſolée. L’amour qu’elle porte à ma Sœur, que je n’ai jamais vue, ne me donne aucune jalouſie. Je n’ai déſiré qu’une ſeule choſe dont j’ai toujours été privée. Ma Mère, abſolue maîtreſſe, a défendu expreſſément à mon Père de ſe ſouvenir qu’il a deux enfans. Il ignore même, à ce que dit Miſtreſs Hemlock, la penſion où je ſuis depuis l’âge de ſix ans, c’eſt pourtant ſa tendreſſe ſeule que j’ambitionne ; ma Mère, qui depuis dix ans que je ſuis ici, n’eſt venue me voir que trois fois, ne m’a adreſſé la parole que pour me reprocher mon exiſtence qui enlève à ſa chère Fille une partie de ſa fortune. Tels ſont les agréables diſcours