Page:Bousquet - Iris et petite fumée, 1939.djvu/28

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
29


amour aussitôt que vous aurez instruit celle que vous aimez de votre folie. Allez ! allez ! Éveillez-la-moi avec des paroles où elle sentira qu’elle se trouvait avant vous, comme elle est au fond de vos yeux l’étoile dont elle est tombée, et son propre consentement dans votre cœur où il n’y aurait jamais que le plus pur d’elle-même pour se refuser à la reconnaître. »


M. Sureau leva la tête : « Ce que vous dites est vrai, commença-t-il ; ma peine est là pour le savoir, Petite-Fumée est à l’image de mon amour, mais mon amour ne veut de moi que dans la mesure où je suis à l’image d’un homme. Or,… »
Il s’interrompit et, comme je le pressais de poursuivre :
« Vous pouvez bien le penser, reprit-il, que je suis toujours entre elle et moi avec ce corps malade et que je ne gagne rien à ce qu’elle sorte de mes pressentiments, car habillée de toile ou de soie, ou de lune ou de reflets marins, je sais que ce n’est pas pour se voir avec mes yeux qu’elle reprend son image aux lois de mon cœur.
« Sitôt qu’elle se retire de mes pensées et qu’elle passe dans ce monde, c’est pour me rejeter du haut de ce qu’elle y rencontre, grande et calme comme elle est, et aussi insaisissable qu’une lumière au