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la terreur en macédoine

— Des malheureux comme toi… Des gens sans feu ni lieu, échappés à d’autres massacres… Mais nous sommes aussi des révoltés, prêts à lutter jusqu’au dernier souffle contre ces bourreaux… à verser notre sang goutte à goutte pour assurer au chrétien le droit de vivre… et délivrer la Patrie esclave.

— C’est beau, cela ! c’est beau et c’est grand !

« Frères ! et toi, sœur, je suis avec vous de cœur et d’esprit… Je combattrai près de vous… et je saurai donner, s’il le faut, pour votre noble cause, cette vie que vous avez sauvée. »

Un hurlement de bête à l’affût coupé ce touchant entretien. C’est une clameur sauvage qui éclate au loin, vibre de bouche en bouche, se rapproche et vient jaillir jusqu’au pied de la maison. Mourad et Soliman tressaillent et se penchent au-dessus du rempart.

« Qu’y a-t-il ? demande Joannès.

— C’est le cri de veille des bachi-bouzouks.

— Je croyais que nous avions affaire aux zaptiés.

— Oh ! bachi-bouzouks… gendarmes… c’est kif-kif ! c’est notre ancien escadron… il y a là des Kourdes venus d’Asie… de vraies bêtes féroces.

«… Tiens !… une idée… »

Obéissant à une soudaine inspiration, Soliman jette à son tour cet étrange appel. Un factionnaire caché au pied du mur lui répond, et un colloque s’échange entre eux. Quelques phrases rapides, proférées dans une langue inconnue. L’entretien est vite fini.

« Quel est cet homme ? demande, intrigué, Joannès.

— Yakoub ! le plus fieffé brigand de tout l’empire… mon meilleur ami.