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la terreur en macédoine

défiant, demeure tapi derrière les roches, inspectant de son mieux cet étrange refuge dont la moitié lui est cachée. Son nombre s’est accru pendant la nuit. La troupe du colonel Ali est arrivée tout entière, et s’est encore grossie des zaptiés et des sopadjis, les assassins de la première heure.

À certain moment, l’altière et farouche silhouette de Marko émerge non loin du précipice. Le brigand regarde de tous ses yeux et gronde :

« Encore échappés ! Ma parole ! c’est à croire que le diable les protège.

« Et nul moyen de les prendre d’assaut !

« Du moins, pour le moment !… car il me faudra au moins huit jours pour amener ici les matériaux d’un pont !

« Mais alors, je les aurai tout vifs !… quand je devrais sacrifier cinq cents hommes ! »

Une semaine ! Ah ! s’il savait que ces malheureux, à bout de ressources, n’ont même pas quatre jours de provisions !

Cependant, là-bas, devant les grottes, sur la partie de l’esplanade bien abritée par les balles, on fait une première distribution de vivres. Une distribution plutôt maigre. Et ces braves gens qui ont tant peiné s’étonnent de recevoir si peu.

Il y a même de violentes réclamations.

Bien qu’il ait le cœur déchiré, Joannès affecte de prendre tout cela en plaisanterie, et répond, en riant, à ces robustes montagnards, tous gros mangeurs :

« Mes amis, nous sommes des assiégés pour tout de bon, ne l’oubliez pas !… Or, tout assiégé digne de ce nom doit posséder une solide ceinture pour la ser-