Page:Boussenard - La Terreur en Macédoine, Tallandier, 1912.djvu/28

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Un tumulte épouvantable emplit soudain la cour et interrompt les rodomontades du gredin.

Il y a des fracas et des ruades furieuses qui se mêlent à des souffles époumonnés, rauques et grondants. Puis, de violents soubresauts, des coups sourds, des râles et ces clameurs angoissées, déchirantes, qu’exhalent, sur les champs de bataille, les chevaux à l’agonie.

Les bandits ne se trompent pas sur la nature de ces bruits, malgré leur violence et leur multiplicité. Ils se jettent en furie vers l’entrée unique donnant sur la cour et vocifèrent :

« Les chevaux !… les chevaux !… malheur sur qui touche aux chevaux ! »

Un groupe se presse à l’ouverture étroite, suffisante au passage d’un gredin armé en guerre, avec carabine en bandoulière et arsenal complet à la ceinture. Des épaules s’écrasent, des cous s’allongent, des têtes convulsées par une rage folle apparaissent.

Et quel concert de malédictions !

« Un massacre !… Fils de truie !… bourreau !… écorcheur !… je t’étranglerai avec tes boyaux !… je t’empalerai tout vif !… je te ferai bouillir dans l’huile !… »

Un spectacle inouï s’offre à leurs regards navrés. Tous les chevaux mutilés se débattent, le jarret tranché, dans une mare de sang. Tombés sur le côté, incapables de se relever, saignés à blanc, les nobles animaux s’ébrouent, hennissent, ruent de leurs moignons et agonisent, lamentables, pendant que les grands buffles noirs, affolés par la vue et l’odeur du sang, les frappent avec furie du pied et de la corne.

Pâle, tragique, sanglant, un homme se dresse au