« Je l’ai suivie plusieurs fois, en transportant dans nos charrettes, le produit du tchetel.
— Alors, tu vas pouvoir nous guider.
— Oui, chef ! Tiens, c’est là-bas, tout là-bas… tu vois, sur la troisième cime, ces blocs carrés, tout blancs, qui semblent des pans de murs.
— Je vois une véritable citadelle…
— Qui arrêterait un corps d’armée !
« Pour y parvenir, des sentiers à donner le vertige… des escarpements à pic… nous devions mettre pied à terre, et porter sur notre dos les charges, comme des mulets !
« Et puis, des coups de pied, des coups de crosse, quand, rompus, courbaturés, nous n’avancions pas assez vite ! Un vrai martyre, pour nous autres gens de la plaine.
— Alors, que deviennent leurs chevaux ?
— De damnées bêtes mâtinées de chèvres !
« Ça grimpe sur les éboulis, ça marche sur les pierrailles croulantes, ça se tient sur les pointes et ça se hisse, je ne sais par quel prodige, au-dessus des précipices affreux… des abîmes où le moindre faux pas vous entraîne ! »
À ce moment, une sonnerie de trompette leur arrive, éloignée, mais vibrante et distincte.
Tous trois arrêtent leurs chevaux, font un quart de conversion et regardent en arrière.
À un kilomètre environ, ils aperçoivent un peloton de cavalerie assez nombreux. Environ vingt-cinq hommes.
Un second appel de trompette retentit. C’est bien un appel, et Michel ne s’y trompe pas.
« Mais, dit-il étonné, c’est la retraite !… Pourquoi ?