pour offrir leurs services, les imprimeries où ils sont certains de ne pas être embauchés. Si l’on a besoin de monde là où ils se présentent, c’est une déveine, mais ils subissent la malchance sans trop récriminer. De plus, détail caractéristique, ils ont un saint-jean, ils sont possesseurs d’un peu de linge et comptent jusqu’à deux ou trois mouchoirs de rechange. Afin que leur bagage ne soit pour eux un trop grand embarras dans leurs pérégrinations réitérées, ils le portent sur le dos au moyen de ficelles, quelquefois renfermé dans ce sac de soldat qui, en style imagé, s’appelle azor ou as de carreau. Un des plus industrieux avait imaginé de se servir d’un tabouret qui, retenu aux reins par des bretelles, lui permettait d’accomplir allègrement les itinéraires qu’il s’imposait. Ce tabouret, s’il ne portait pas César, portait du moins sa fortune.
Mais passons à la seconde catégorie. Ceux-là ont une horreur telle du travail, que les imprimeries où ils soupçonnent qu’ils en trouveront peu ou prou leur font l’effet d’établissements pestilentiels ; aussi s’en éloignent-ils avec effroi, bien à tort souvent ; car le dehors de quelques-uns est de nature à préserver les protes de toute velléité d’embauchage à leur endroit. D’ailleurs, si les premiers ne se présentent pas souvent en toilette de cérémonie, les seconds, en revanche, exposent aux regards l’accoutrement le plus fantaisiste. C’est principalement l’article chaussure qui atteste l’inépuisable fécondité de leur imagination. L’anecdote suivante, qui est de la plus scrupuleuse exactitude, pourra en donner une idée : deux individus, venant s’assurer dans une maison de banlieue que l’ouvrage manquait complètement et toucher l’allocation qu’on accordait aux passagers, étaient, l’un chaussé d’une botte et d’un soulier napolitain, l’autre, porteur de souliers de bal dont le satin jadis blanc avait dû contenir les doigts de quelque Berthe aux