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XIe siècle. S. Bruno, fondateur.

Bruno quitta donc Sèche-Fontaine, et c’est vers le Dauphiné qu’il dirigea ses pas. Quand il entra à Grenoble, six compagnons s’étaient joints à lui : Lauduin de Lucques en Toscane ; Hugues surnommé le chapelain ; Étienne de Bourg et Étienne de Die — l’un et l’autre chanoines réguliers de la congrégation de Saint-Ruf ; — et deux laïcs, André et Guérin. Or, au moment où Bruno arrivait à Grenoble, saint Hugues, évêque de cette ville, eut un songe : il voyait sept étoiles tomber à ses pieds, se relever ensuite, traverser des montagnes désertes pour s’arrêter enfin dans un lieu sauvage appelé Chartrouse ou Chartreuse[1]. Hugues remarqua alors que des anges, sur l’ordre de Dieu, bâtissaient une demeure dans cette solitude, et sur le toit de l’édifice apparurent de nouveau les sept étoiles mystérieuses[2]. L’Évêque se demandait avec anxiété quelle pouvait être la signification de ce songe, lorsque, soudain, il voit entrer nos sept voyageurs qui tombent à ses pieds en lui exposant leurs désirs et le but de leur voyage. Je sais, dit aussitôt le pieux Évêque avec bonheur, je sais l’endroit qu’il vous faudra choisir : Dieu vient de me l’apprendre, il l’a indiqué lui-même, et je vous

  1. La vallée de Chartreuse prend son nom du village de Saint-Pierre-de-Chartreuse : on disait autrefois, Chartrousse ou Chartrosse, prononciation que l’on trouve encore maintenant dans le mot Chartrousette ou Ohartrosette.
  2. Brevis Historia Ord. Cartus. apud Martène ; Veter. Scriptor. Amplissima Collectio ; t. VI, p. 150. — Cette vision, rapportée aussi dans la Vie de saint Hugues de Grenoble par Guigues, qui la tenait de la bouche même du Saint, n’a jamais été mise en doute par qui que ce soit, même par Baillet l’hypercritique.