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Page:Boutroux - Les principes de l’analyse mathématique.djvu/74

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appelle souvent du même nom « géomètres », ceux qui s’adonnent à l’une ou à l’autre science[1].

Quels liens y a t-il entre les deux sciences sœurs ? C’est ce dont nous allons nous rendre compte en étudiant dans le présent chapitre la théorie des grandeurs.

Il nous faudra, il est vrai, supposer connues certaines propriétés des figures qui ressortissent en droit à notre chapitre iii. Mais ces propriétés sont si simples et elles nous sont à tous si familières que le lecteur voudra bien nous autoriser à les regarder comme acquises. En fait elles furent, plus ou moins consciemment, utilisées par les hommes primitifs longtemps avant que ne s’ouvrit l’ère de la démonstration et de la science rationnelle. Et les géomètres grecs, eux-mêmes, ne cherchèrent pas tout d’abord, à les analyser[2], mais les acceptèrent d’emblée comme point de départ de leurs déductions. Il nous sera donc permis de les admettre à notre tour, afin de pouvoir étudier tout de suite cette pseudo-géométrie, prolongement direct de l’arithmétique, où la figure n’intervient qu’à titre accessoire et sous une forme aussi réduite que possible.

53. Longueurs rectilignes. – Le type par excellence de la grandeur géométrique est la longueur rectiligne, c’est-à-dire la longueur d’une ligne droite[3] limitée, ou, plus précisément, d’un segment rectiligne portion de droite compris entre deux points et C’est à ce type de grandeur, le plus simple et le plus clair que les mathématiciens s’efforcent de ramener toutes les autres.

  1. C’est en ce sens qu’il faut interpréter la phrase célèbre inscrite, d’après la légende, au fronton de l’Ecole de Platon : Nul n’entre ici s’il n’est géomètre.
  2. Voir, sur la définition logique des figures élémentaires le Deuxième livre, chap. v.
  3. C’est à dessein que nous ne donnons, dans ce paragraphe, aucune définition de la ligne droite et du plan. Nous avons de ces notions premières une vue intuitive, que nous ne pourrions qu’obscurcir en cherchant à en donner prématurément une définition logique, l’ne droite, c’est une règle sans épaisseur ; un plan, c’est, par exemple, un tableau noir ou une feuille de papier. Euclide lui-même ne nous donne, dans son système de géométrie (voir ch. iii, § 4) aucune explication logique des notions premières et de leurs propriétés, mais se borne à spécifier quelles sont celles dont il a besoin pour édifier ses « Eléments ».